Le paysage de l’architecture en terre crue reste, de nos jours, largement méconnu du grand public. L’enthousiasme manifesté pour son renouveau, dans notre société actuelle, repose sur des passionnés conscients de la richesse du domaine, mais demeure encore aux balbutiements d’un effet de corps. Malgré de nombreuses années de veille patiente d’associations soucieuses du patrimoine local, et de la technique constructive vernaculaire, et la production d’inventaires régionaux variés, la construction en terre crue demeure masquée sur le territoire.
Cachée sous de nombreux enduits de natures variées, la terre crue dans les édifices ne demande qu’à s’épanouir à nouveau dans un monde qui s’empare de ses qualités intrinsèques pour l’avenir de la construction, mais ignore en détail l’état dans lequel est notre patrimoine à ce sujet.
Les recherches suivantes ont été menées par Maude Cannat,  au sein du laboratoire GPEM (Granulats et Procédés d’élaboration des Matériaux) de l’Université Gustave Eiffel avec Erwan Hamard, chercheur, Loris Verron et Adrien Aras doctorants.
 
Il s’agit d'établir une démarche d'inventaire du patrimoine bâti en terre crue toutes techniques confondues dans le bassin clermontois en France.
Pour y parvenir, nous avons fabriqué et éprouvé en équipe une démarche d’inventaire du patrimoine bâti qui se prête à parcourir une étendue de près de 1 200 km2.
Au cours de cette étude, observer le patrimoine se fait avec les outils multiples dont nous disposons actuellement dans une recherche historique, en tant qu’architecte du patrimoine, tout en traduisant la recherche sur un objet commun interdisciplinaire : une carte géoréférencée.
Décomposée en trois volets, le rapport d’étude mène un diagnostic de la connaissance de la terre crue sur ce territoire topographiquement délimité en rendant compte de la démarche construite à cet effet. Après une lecture de la région au travers de la recherche documentaire et historique est exposé la préparation d’une semaine d’exploration puis le carnet de bord, premier visage sur le vif de la richesse et la diversité des architectures de terre crue observées. L’itinéraire de parcours sur site est réfléchi pour valider ou infirmer des hypothèses émises au stade de la recherche théorique hors site.

Parcours au cœur des différents paysages constructifs de la plaine de la Limagne, selon les techniques observées

L’étude se conclue dans un troisième volet, dont voici quelques extraits :
 - Un glossaire des techniques, matières et teintes, vient dessiner la base de l’analyse des données récoltées par techniques
En pisé

lim 32 - diagonales et angles renforcés à la chaux, premières levées stabilisées, trous de boulins superposés, partiellement bouchés

lim_587 - cordons de chaux très fin entre chaque couche, trous de boulins en quinconce bouchés

lim_805 - cordon de chaux gras entre chaque levée et fin entre chaque couche, diagonales renforcées superposées et trous de boulins

En adobes

lim_185 - lits d'adobes assisées, pose formant motif régulier jointoyées au mortier de terre

lim_828 - lits d'adobes lessivées, posées en panneresse et boutisse, mortier fin

En bauge

lim_823 - neuf levées de bauge fissurées avec retrait vertical,  formant mur

lim_822 - levée de bauges lessivées sous enduit éclaté

 - Un corpus d’édifices extraits de l’ensemble des plus de 800 points relevés au cours de la semaine d’enquête pour détailler l'histoire, la mise en œuvre et les campagnes de chantier des bâtiments étudiés

Assises en pierre maçonnée, levées de pisé et pose d'adobes en partie haute des murs

Soubassement maçonné en pierre puis levées de bauges sur un hangar agricole

Dernier mur existant d'une construction démolie, mélange de levées de pisé, adobes et blocs de terre crue irréguliers

Cette cartographie documentée, ébauche un premier visage de la construction en terre crue en Limagne. C'est une invitation à la découverte et la recherche de ce patrimoine commun, au pied de chez nous de la terre que nous foulons.
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